Les cages du Sans nom [Quête Principale]

Après avoir vomi le reste de l'eau qu'elle avait ingurgité quand elle avait manqué de se noyer, Lalia se sentit mieux. Enfin presque. Non seulement elle se sentait vide et faible, mais en plus elle se sentait terriblement honteuse. Se mettre dans une telle position de déchéance... Elle ne se le pardonnera jamais. Elle qui était habituée au champagne et aux croisières de luxe, voilà qu'elle tombait dans les pommes, qu'elle se noyait et qu'elle vomissait des litres d'eau de mer sur le parquet grouillant de vermine d'un rafiot de bois pourri habité par des cadavres vivants. Étant donné qu'elle flottait dans les hautes sphères, elle ait souvent eu accès à de la drogue de très bonne qualité, et savait ce qu'était qu'un "bad trip". Le problème, c'est que celui-là était tout à fait réel ....
Avant même qu'elle eut le temps de se plaindre intérieurement d'avoir gâché son tailleur en soie sauvage et son cardigan qui avaient coûté un prix astronomique, la femme blonde, dont elle se souvenait qu'elle portait un nom comme Odile,(ou Odila, ah ! c'est vrai! Odilia) la traîna à côté d'elle comme un vulgaire sac de farine. Au vu de ses manières et de la façon dont elle était habillée, la jeune française comprit que cette Odilia était du peuple. Quelle horreur ! Se trouver mêlée à des classes si basses... Mais il fallait avouer qu'elle avait eu la gentillesse de la relever, elle devait donc être conciliante.
Cependant, Lalia perdit toute envie de faire preuve de bonne volonté quand la femme l'amena avec elle dans une sorte de penderie sans fond, grouillante d'insectes à l'aspect peu engageant. Elle voulut lancer un cinglant : " Là-dedans ? Vous n'y pensez pas tout de même !", mais n'y parvint pas car elle n'avait pas la force d'émettre un seul son. Elle se laissa donc transbahuter sans cérémonie au fond d'un autre trou à rat noir comme un four. Tandis que Lalia habituait ses yeux à l'obscurité, elle entendit les deux autres - Melena et Yoru, d'après ce qu'elle avait compris- descendre en trombe. Apparemment, elle ne serait entourée que par des personnes de bas étages, elle devra bien s'y faire...
En s'asseyant, Lalia saisit que la femme qui l'avait amené avec si peu de délicatesse souhait avoir une source de lumière pour lire un bout de papier crasseux qui ressemblait à une lettre. Elle mit alors son cerveau en action. Tout le bois qui l'entourait était moisi et humide, donc impossible d'y mettre le feu, et aucun des trois autres embarqués ne semblaient être fumeurs, donc pas de briquet. Alors qu'elle faisait tourner son intellect à toute vitesse,elle eut une illumination. Son idée était plus que fumeuse et n'était basée sur rien de concret. Et pour couronner le tout, était contraire à la plus élémentaire loi de la physique. Mais qui ne tente rien n'a rien, comme dit le diction. Ainsi, Lalia se racla la gorge, et lança:

-Il me semble que j'ai une idée, cependant l'accomplir seule est au dessus de mes forces. Je vous prierais donc de m'apporter votre aide

Jade, encore sous le choc fixa James avec des yeux ronds, la bouche légèrement entrouverte par la stupéfaction. Comment ça « pourquoi y’a des morts » ? Elle avait l’air d’une encyclopédie Dreamlandienne ?

- Comment tu veux que je sache ça ? Ils sont là c’est tout !

Après cette remarque d’une profondeur extrême, Jay se colla un peu à Elie qui semblait décidée à traverser le pont d’algues pour aller trouver le nom de ce fichu rafiot et enfin avoir la paix, où ce qui s’en rapprochait le plus possible. Les brunettes adressèrent à James avec une synchronisation parfaite un geste de la main afin qu’il leur emboite le pas.

Elles s’aventurèrent avec lenteur sur le pont visqueux, la bonne jumelle cramponnant la mauvaise avec toute la force du désespoir. Ça ne l’empêcherait en rien de tomber mais un contact physique était toujours rassurant… ou pas en fait. Dépendait de la personne qu’on touchait. L’adolescente frissonna à cette pensée en manquant de les faire chuter mais refoula bien vite ses effrayants souvenirs : elle avait bien assez à penser avec la situation qu’elles vivaient en ce moment !

Malgré l’aspect glauque du sans-nom, poser le pied sur le bois pourrissant du bateau était d’un réconfort extrême. Au moins elles ne risquaient plus de faire un plongeon d’une vingtaine de mètres pour atterrir dans ses eaux gelées. Ça allait peut-être bien à Kate Winslet dans Titanic mais franchement, non merci ! Que les autres tombent dedans les uns après les autres si ça leur disait, mais si on pouvait éviter une pneumonie c’était vraiment pas du luxe.

Le stress allant croissant, Jade profita d’un bref répit pour avaler une pilule magique du capitaine Mikles et s’offrir un peu de paix intérieur ainsi qu’un air béat en totale inadéquation avec l’atmosphère qui régnait ici. Le trio s’avança d’un pas vif entre les corps décomposés des marins qui leur offraient de repoussants sourires agrémentés de vers et d’une odeur de putréfaction insoutenable. Elie en profita d’ailleurs pour remonter son haut sur son nez pour respirer un air moins pestilentiel.

Une fois assez éloignés de la troupe de zombis, El’ se tourna vers ses compagnons pour leur souffler d’un air entendu :

- On file à la cabine du capitaine. Les lettres sont tombées, soit, mais il reste peut-être des traces, de la rouille ou je ne sais quoi là où elles étaient non ? Et au pire on cherchera un journal de bord…

Ils filèrent vers leur objectif non sans mettre de temps à autre le pied dans un des trous qui semblaient pulluler sur cette coque de noix. Une fois devant la porte, Elie leva les yeux pour examiner le bois pourri, passa ses doigts blancs là où s’était auparavant trouvées les lettres composant le nom…

Elle n’en tirerait sûrement rien, mais si elle arrivait ne serait-ce qu’à connaître le nombre de lettre composant le nom ce serait déjà un grand pas en avant. Ensuite elle n’aurait plus qu’à réciter tous les mots du dictionnaire correspondant à leurs données et le tour serait joué… elle soupira à cette pensée sans remarque que Jade venait de pénétrer seule dans la cabine avec son air imbécile que lui donnait ses médicaments.

La pièce avait dû être belle à une époque, mais tout n’était plus désormais qu’un bordel sans nom, et dans un état lamentable. Lys et Jonh était là mais dans son état la brunette ne sembla même pas le remarquer et fit le tour de la pièce sans que son regard ne s’arrête sur quoi que ce soit. Des vêtements, des cartes, des bouquins… il n’aurait pas pu tagger le mur avec le nom de son fichu bateau ? Un rire étrange s’échappa de ses lèvres alors qu’elle attrapait un vieux livre poussiéreux. Quelles conneries quand même, c’était impossible ! Ils passeraient le reste de leurs jours à chercher quelque chose qu’ils ne trouveraient jamais et ils finiraient comme ces mecs dehors. Quelle blague !

Elle feuilleta le livre et ne réussit qu’à éternuer à cause de la poussière. Elle reposa donc l’ouvrage précipitamment avant de s’approcher du bureau où s’entassait les cartes maritimes, des boussoles cassées, compas et autres choses totalement inutiles. Un carnet attira malgré tout son attention et elle s’en saisit avant de l’ouvrir et de souffler sur les pages pour ne pas répéter son erreur.

- Ah-ah ! Bon, déjà c’est plus intéressant que ses caleçons…

Jade rangea dans sa veste le recueil sur lequel on pouvait lire « journal de bord ». Si le nom n’était pas marqué dedans, il ne serait nulle part…

Alors qu'elle redoutait de pousser cette maudite poignée Jonh l'y aida, posant sa main chaude sur celle de la rousse qui ne pu réprimer l'habituelle bouffée de chaleur à ce contact - notamment du à la disparition passagère de sa déprime habituelle. Les couleurs étaient sombres mais ils trouvèrent vite la chambre du capitaine, bien différente de celle de ce cher George Mikles, sosie de Jack Sparrow. Celle-ci était dans un désordre le plus total, et la propreté laissait à désirer. Soit, ce n'était pas le moment de faire la fine bouche ! Lys vit Jonh s'attaquer aux tiroirs défoncés du bureau, aussi décida-t-elle de se diriger vers la planchette qui servait d'étagère au dessus du lit, sur laquelle on pouvait voir quelques cartes enroulées.
L'étagère n'était qu'à deux mètres, trois tout au plus. Et pourtant il fallu presque cinq minutes à l'anglaise pour y parvenir ! En effet, entre la houle plus que présente et le désordre c'était un vrai parcours du combattant que d'y parvenir, d'autant que le sol était, comme le reste, couvert d'algues glissantes et puantes à souhait. Ce n'est donc qu'au bout de cinq longues et frustrantes minutes que Lys parvint à la fameuse étagère, trop haute pour elle, devant grimper sur le lit aux tâchés - et le rousse ne voulait pas savoir de quoi - pour y accéder. C'est lorsqu'elle s'était emparée de la première carte qu'elle vit Jade entrer et chercher sur le bureau. Lys ne pu réprimer un froncement de sourcil lorsqu'elle vit la belle brune si proche de Jonh, de SON Jonh.

Idiot. Stupide. Complètement con. Elle cherche, c'est tout, tu n'as pas à t'inquiéter. Et d'ailleurs pourquoi je m'inquièterais ? Nous ne sommes qu'amis après tout, n'est-ce pas ? Hein ? Oh et merde je ferais mieux de chercher si je ne veux pas me transformer en momie d'algues !

Lys déroulait la première carte, tentant de comprendre quelque chose au charabia décoloré et tâché de ce qui semblait être du café lorsqu'elle entendit Jade marmonner quelque chose.

- Tu as trouvé quelque chose Jade ? demanda la rousse.

Mais elle avait déjà rangé cette chose dans sa veste. Avait-elle trouvé quelque chose d'important ? Dans ce cas, pourquoi le cacher ? Elle voulait garder la réponse pour elle et laisser les autres galérer ? A l'idée de chercher le nom de ce maudit bateau en vain et de finir en monstre marin digne d'une mauvaise adaptation de L'Ile au Trésor la jeune anglaise eut l'impression qu'un poids s'était affalé sur ses épaules. Non vraiment, elle espérait que la brune partagerait ses trouvailles... et qu'elle n'allait pas les laisser devenir des zombies des mers !

*Je n’ai pas peur. Peur de quoi d’ailleurs ? D’être tuée par une bande d’algues ou par les morts vivants qui les dirigent ? Rhaaa…*

Dakota, perchée sur les épaules de Bloody Mary tentait de garder son calme. Heureusement que la revenante avait accepté de l’éloigner de ces formes de stress car l’adolescente aurait sûrement été, dans le cas contraire, en proie à une crise de panique. Bizarrement, les raisons de ses peurs semblaient fondées cette fois ci et ce n’était pas pour la rassurer.

Tout n’était que chaos : les algues rampaient sur le sol tels des serpents pour se saisir des imbéciles inattentifs ou trop fatigués pour se défendre, les morts jouaient un air de musique en les menaçant, des corps tombaient dans l’eau, des cris raisonnaient dans la nuit…

Et elle, les yeux clos et dans sa position ridicule fermait les yeux et se massait les tempes en inspirant profondément. Inspirer, expirer, inspirer, expirer… Ca ne servait à rien concrètement mais ça faisait du bien, elle réussit même au bout d’un moment à ouvrir les yeux pour se rendre compte que son invocation l’avait gentiment mené sur le pont du sans-nom. Mary croyait franchement qu’elle allait s’amuser à chercher le nom perdu d’un bateau maudis et peuplé de morts-vivants ?! Elle n’avait pas encore dû cerner le personnage alors, mais Dak’ dû bien se rendre à l’évidence que d’accord ou pas elle n’avait pas le choix.

Elle laissa les premiers sur place se ruer comme des charognes sur la cabine du capitaine et pénétra dans le bateau par une seconde porte qui donnait sur des escaliers vermoulus. Bloody Mary disparue juste après que la phobophobe eut posé un pied dans la pénombre, la porte se refermant derrière elle dans un grincement sinistre. Un frisson parcouru son échine alors que la chair de poule gagnait peu à peu du chemin. La blondinette se surprit même à espérer avoir de nouveau le pouvoir de Christopher.

Dans ces conditions, avoir le cul qui brille était un avantage, ridicule ou pas.

Elle s’accrocha à deux mains à la rampe rongée aux mites et descendit avec lenteur l’escalier, cherchant des yeux la moindre parcelle de lumière. Rien, toujours rien, le noir et des marches, encore des marches, toujours des marches, si seulement elle avait pu avoir un simple petit trou lui permettant de discerner ce qui l’entourait !

A peine cette pensée eut-elle traversé son esprit qu’un craquement inquiétant résonna sous ses pieds, juste avant que le bois cède et ne la fasse dégringoler d’un étage dans un hurlement de frayeur. Les gens l’ayant entendu supposaient certainement qu’elle était morte mais non, juste un peu sonnée, terrifiée et terriblement énervée. D’ailleurs ça s’entendait.

- Ah mais merde ! Putain ! Je voulais un trou pour de la lumière ! Pas tomber dans un trou ! Une chance que je soit entière ! Franchement ! J’en ai ras le cul de toutes ses conneries !

La gamine se remit sur ses jambes tant bien que mal dans un concert de grognements. Heureusement que sa main blessée avait commencé à guérir sinon elle se serait probablement retrouvée avec une gangrène à la fin du voyage…

Elle jeta un coup d’œil circulaire dans la pièce envahie par les algues et une odeur de putréfaction. On aurait dit une cale, avec des tonneaux, des caisses et tout un tas de saloperies entassées dans un coin. Un escaliers qui montait se trouvait dans un coin de la pièce, et une porte de l’autre côté. Une porte ?

Dakota s’en approcha non sans précautions, tendant l’oreille afin de s’assurer qu’il n’y avait aucun danger. Des voix semblaient s’élever de ce côté, mais de vivants ou de morts ça impossible de le savoir. Malgré tout il restait la possibilité pour que ce soit les voix d’une personne connaissant le nom du bateau, ça valait donc le coup d’ouvrir cette porte et d’en avoir le cœur net. Dakota avança donc sa main tremblante vers le bouton de la porte, sursauta au contact du métal glacé mais fini par tourner la poigner et pousser la porte avec appréhension.

Sauf qu’il n’y avait aucune raison pour ça. A part une bande de voyageurs qu’elle avait entraperçu sur le Slavedog Millionnaire la pièce ne renfermait rien. L’adolescente resta donc une longue seconde dans l’embrasure, le visage impassible tout en scrutant le petit groupe avant d’ouvrir la bouche pour lâcher d’un ton aussi glacial que le pôle noir.

- Rien d’intéressant ici.

Elle referma aussitôt la porte sur eux et fit volte face avec la ferme intention de remonter, mais le grincement de la porte derrière elle l’informa qu’une des personnes présente au moins avait choisit de son côté de la suivre, avec ou sans son accord.

James réprima une moue vexé devant la réponse de Jade. Il aurait juste voulu savoir en fait ce que ces morts leur voulait ayant loupé un épisode. Mais ca n'empêcha pas au jumelles avec une synchronisation parfaite ( la classe !) d'inviter l'adolescent à les suivre. Au moins il ne serait pas tout seul...Il allait pour les suivre lorsqu'il entendit des pleurs qu'il avait déjà perçu une fois...la seule personne qui hurlait comme ça c'était Brooke. En fait la jeune femme était au fond sensible...James tourna la tête pour la chercher des yeux , les plaisant pour mieux voir lorsqu'il remarqua un attroupement de mort près d'une rambarde et ce qui semblait être des doigts.
Merde...L'adolescent inspira à fond et c'est avec un stress intense , parce qu'il avait aucune envie de passer près des morts vivants et ne voulait pas passer par dessus bord, qu'il se dirigea vers la pauvre Brooke.
Si ces cadavres l'embêtait il les pelucheniserai, ca ferait un remake de l'horrible noel de Mr Jack. Mais avec une main en compote ca allait pas aider...James , enfin Jules maintenant...saisi le poignet fermement de la jeune femme et la regarda par dessus le bord.

- M'en veux pas mais j'ai pas le choix !

Il se concentra sur cette dernière et l'imagina en peluche. Toute façon c'était pas la première fois qu'elle se retrouvait sous cette forme. Maintenant qu'elle était assez léger , Jules/James la souleva et garda la peluche Brooke contre lui. Qui sait ces morts vivants étaient peut être peluchophile...

- Bon on va rejoindre les jumelles

Sans laisser le temps à Brooke de décider l'adolescent alla traverser le petit pont bien glissant et alla rejoindre Elie qui s'éclatait à passer ses doigts sur le panneau du "o".

- Bon à moins que tu veuilles que je serve à rien et je te regarde t'éclater à nettoyer , faut faire quoi sur ce rafio ?

Alors que Jonh essayait tant bien que mal à ouvrir les vieux tiroirs du bureau, car oui grâce à la magnifique ancienneté et humidité certains de ces casiers avaient du mal à s'ouvrir, le jeune homme sentit une présence près de lui et se retourna. Une jeune femme brune se tenait près de lui et avait l'air comment dire...Un peu à l'ouest comme si elle était shooté. La drogue existait aussi dans ce monde ? Il regarda la nouvelle venue prendre une une sorte de carnet et la mettre dans sa veste lorsque la voix de Lys s'éleva dans la pièce. Elles se connaissaient apparemment...peut être avait elles travaillé ensemble sur le Millionnaire.
Alors pourquoi donc Jade cachait elle sa trouvaille ?

- Jade, c'est ca ? Etant donné qu'on est tous sur le même bateau...Tu crois pas qu'on devrait s'entraider plutôt que de jouer à " je vais trouver en premier le nom du bateau" ? C'est juste une suggestion...

Après tout quitte à être dans le même partie, pourquoi se faire la course ? A plusieurs il serait plus aisé de trouver la réponse que les Morts vivants attendaient. Jonh regarda Lys et lui demanda :

- Tu as trouvé quelque chose de ton côté ?

Ca question était stupide sinon la jeune rousse n'aurait pas demandé à Jade si ,elle , avait trouvé un truc et puis Lys n'aurait pas tardé à lui dire qu'elle avait trouvé quelque chose, un indice, un truc dans le genre.

- Oublie ma question

Il n'y avait sans doute rien d'autre à voir dans cette cabine au milieu de toutes ses cartes et ses livres ,mise à part ce qu'avait prit la jeune femme brune. Jonh espérait qu'elle voudrait bien partager sa trouvaille, à moins que cette dernière ne soit en faites pas toute seule et que ses camarades l'attendent dehors.

Yoru n’allait pas tarder à craquer. La première vague d’insulte était passée, mal mais elle était passé quand même ! La deuxième était déjà plus dur a digerer. Surtout que là, ça partait trop loin. L’asiatique prit tout de plein fouet mais répondit à chacune de ses insultes. « Docteur Nakatomi »O__o Nan mais je rêve !! Il lança indifférent et froid:

-Ma parole mais t’es conne ou tu le fait exprès ?! Putain mais tu te prends pour qui à me parler comme ça, tu crois que j’ai choisis de jouer les docteurs tout comme j’ai choisis d’être ici dans cette cale pourri avec toi ?!! Bordel c’est ouf, j’y crois pas.. !

Dépassé par cette dispute qui ne mènerai a rien, le jeune homme détourna son regard méprisant de Melena pour commencer a vraiment observer le lieu dans lequel il se trouvait, il n’eut le temps de réaliser que la brune répliqua. L’asiatique serra les dents et baissa le regard de nouveau. Elle l’énervait, tout ce qu’elle disait l’énervait.. Il attendit qu’elle termine et répliqua aussi vivement qu’elle :

-C’est bon.. Tu as terminé de t’acharner sur moi ? Si tu crois que me critiquer ou revenir sur des trucs passés servira à faire avancer les choses, tu te met le doigt dans l’œil jusqu’au coude ma p’tite ! Je ne vois pas pourquoi je devrais m’excuser et tu n’es pas mon genre alors c’est réglé !

Un sourire se dessina sur ses lèvres tandis qu’il leva le regard au ciel agacé. Malgré tout la brunette reprit son combat >.< Elle était coriace !! Mais Yoru aussi !! xD Il l’a regarda alors et vit qu’elle se mettait presque à pleurer. D’un coup le cœur de Yoru se serra, quoi ? Il avait dit quelque chose de vexant ? =O Toutes ces questions.. Pour rien au bout du compte ! Soit elle faisait un gros complexe d’infériorité, soit elle avait vraiment une dent contre Yoru, ou les deux ! x) L’hypocondriaque resta muet à cette dernière phrase, il s’accorda pour dire après un temps de réflexion :

-Arrêtes de chouinner on a pas que ça à foutre..

Froidement, l’asiatique tourna le dos à la jeune fille pour se retrouver nez-à-nez avec une blonde qui dégobillait juste à ses pieds. La vue était immonde, l’odeur insupportable, les conséquences désastreuses !! D’un coup l’asiatique se recula vivement et vint se plaquer à un hamas de caisses et objets poussiéreux et craceux qui le répugnait tout autant, il grimaça et gueula.

-HAA ! MAIS C’EST QUOI CES CONNERIES ! Qu’est-ce tu fous , c’est gore !! Mais ARRETES !!!

La réplique était lancé, l’asiatique était dégouté si bien qu’il avait désormais la nausée, il se sentait tout faible et paralysé. Maintenant il réalisait où il se trouvait ! =p Un bateau encore plus horrible que le précédent où la saleté et les virus régnaient. Un lieu hostile pour l’hypocondriaque qui sans pouvoir se contrôler, commença une crise d’angoisse. Son cœur se mit a battre très fort et sa respiration s’accélérait petit à petit, il commença par frotter frénétiquement (et inutilement) ses mains sur son débardeur mouillé, il voulu l’enlever mais se ravisa plusieurs fois, il piétina nerveusement le sol et se mit à regarder tout autour de lui dans un excès de peur évident puis il en vint à s’accroupir et se recroqueviller sur lui-même. Puis plus rien. Il resta muet, les yeux fermés.

*C’est sale partout c’est sale.. elle en fou partout et tout autour.. tout autour il y a plein de virus, j’veux pas mourir.. Je le sens, je le sens ! Je suis malade ça y est ! Mais non je ne peux pas.. Résistes.. résistes..*

Il concentra à présent son esprit sur la tâche à accomplir à savoir retrouver le nom du bateau, mission qu’il fallait à tout prix réussir pour sortir d’ici. L’hypocondriaque entendit alors la voix de Odilia qui lui demandait de venir. L’asiatique releva la tête et seul son objectif lui permit de se lever et marcher en direction des autres mais en gardant un certain écart vis-à-vis des autres. Il ne voulait approcher personne ni ne rien toucher autour de lui. Sa survie dépendait à présent de sa vigilance. Il se sentait maintenant malade, il le savait, il avait attrapé quelque chose, c’ était forcé par les circonstances ! Peut-être allait-il mourir bientôt, une simple grippe le terrasserai cruellement vue l’état de son système immunitaires si peu accoutumé(quoique peut-être endurci depuis le temps) à tant d’attaques de virus et blessures en tout genre.
La deuxième salle était très sombre. Encore plus sombre que la précédente. On n’y voyait rien en clair et les 4 compagnons d’infortune se retrouvaient donc là.. bah comme des cons.. ! -__- L’asiatique passa sa main dans sa poche arrière de pantalon plein d’espoir, l’espoir de trouver sa lampe torche laissée la depuis un bon moment déjà, l’espoir de trouver ce gadget pas trop endommagé par l’eau. Une fois sortie, il essaya de la faire fonctionner mais bien évidemment, elle ne fonctionnait pas.. Agacé l’asiatique balança cet objet désormais inutile en soufflant :

-Putain d’gadget à la con.. Ca fonctionne même pas quand on en a besoin..

A ce moment précis, la porte du fond s’ouvra dans un grincement, l’asiatique vexé aperçu alors la silhouette d'une jeune fille qui referma aussitôt la porte, il lui emboita le pas. Une fois dehors il l’interpela dans la pénombre mais se ravisa de la prendre par le bras :

-Hey toi ! Excuses-moi mais qu’est-ce que tu fais toute seule ? Toi aussi tu cherches le nom ? (Un temps se fit et il ajouta) Dis, t’aurai pas je sais pas.. un briquet.. une lampe torche ?

La question était conne mais si ils comptaient faire des recherches, il fallait bien commencer quelque part..

Odilia répondit au regard de Melena et vint en aide à la femme malade. Au même moment, le jeune japonais s’était mit à hurler comme un possédé à la vue du malaise de Lalia. Il s’agitait dans tous les sens en poussant de petit gémissement de peur, son visage déformé par quelque chose qui ressemblait à de la folie. L’adolescente italienne fit traverser de l’autre coté de l’armoire la nouvelle venue, laissa la necrophobe seule à contempler avec des yeux ronds le spectacle désolant de Yoru qui cédait à sa phobie.

*Ce type est vraiment…*

La brunette n’eut pas le temps de trouver un adjectif approprié. Quand elle vit son comparse se recroqueviller sur lui-même, tremblotant, et les yeux clos, une once d’inquiétude finit par la toucher. Apparemment, il avait soudainement vu quelque chose qui avait déclenché chez lui une crise d’hystérie… mais qu’est-ce que c’était ? Il était psychotique ? Voir le jeune homme dans un tel état fit regretter à l’irlandaise les mots acides qu’elle avait eut à son égard ; ou plutôt, elle admit qu’elle y avait peut-être été un peu fort. Melena s’approcha silencieusement et effleura son épaule.

- Yoru, qu’est ce que tu as ?

Il ne paraissait pas l’entendre. L’irlandaise se demandait bien pourquoi elle se sentait coupable de le laisser seul. Peut-être parce que son désespoir soudain lui rappelait celui qui lui rongeait les entrailles ? Parce qu’elle avait perçu dans leur précédente dispute une espèce de colère sincère qui témoignait de sa lassitude et dont la voix criait « je ne veux rien d’autre que rentrer chez moi sain et sauf ! ». Elle se reconnaissait dans la panique de Yoru ; et un court instant – imperceptible –, Melena fut prise d’un élan d’affection pour lui.
Odilia finit par les appeler. Son compagnon se leva brusquement et partit au travers l’armoire. La jeune fille suivit en prenant soin de ne pas trop toucher le bois vermoulu où rôdaient encore quelques cafards pour rejoindre le trio dans une salle encore plus sombre que la précédente. Lalia était assise par terre et scrutait du mieux qu’elle pouvait son cercle d’acolyte avec une expression où il semblait percer le mépris. L’irlandaise n’y porta pas attention, car Odilia leur présentait une lettre qu’elle disait avoir récemment trouvé sur le Sans-nom.

- Je n’ai pas de torche désolé.

Yoru qui se tenait nerveusement à l’écart des filles chercha dans la poche de son pantalon pour en sortir une lampe… qui ne fonctionnait pas. Pestant contre son outil, il le balança dans un coin sombre où il aurait désormais du mal à le récupérer.

- Tu sais, en la faisant sécher, et avec d’autres piles, elle aurait peut-être fonctionné à nouveau. Souffla Melena, désormais soucieuse de ne pas l’irriter.

Elle commençait à se calmer, à reprendre ses esprits, et réalisait que ce n’était pas en nourrissant des conflits entre eux qu’ils allaient réussir à s’en sortir. D’autant que quelque soit la maladie mentale de l’asiatique, il avait l’air plutôt instable pour le moment. Ici, l’avantage était qu’ils n’étaient pas soumis aux rudesses des traitements des hommes du S.M., la jeune fille pouvait réfléchir plus posément. Un cliquetis de loquet la fit sursauter. Une autre porte, restée invisible car située dans un coin sombre de la pièce, s’ouvrait et la tête d’une petite brune passa dans l’entrebâillement pour les observer un instant, avant de faire demi-tour avec une remarque indifférente.

*Mais je rêve ?! Elle nous a vu ou quoi ?!*

Yoru courut la rattraper ; Melena parvint à son tour à la porte quand celui-ci demandait à la nouvelle si elle avait de quoi faire un peu de lumière et sortit de la pièce. Il y avait un escalier qui montait. L’état du bois était au moins identique à celui des meubles à l’intérieur de la pièce, mais au moins, ils quitteraient ce débarras sans nom.

- Tu viens du Slavedog Millionnaire aussi non ?

L’irlandaise détailla rapidement la gamine. Elle était sèche au moins, elle avait dû passer par le pont. Odilia et Lalia vinrent à leur tour se montrer à la porte.

- Ce n’est peut-être pas prudent d’être seule dans un endroit pareil, tu ne crois pas que tu ferais mieux de rester avec nous ?

La brunette eut la sensation que sa question était malvenue. L’expression de Dakota, tout comme le fait qu’elle les avait volontairement ignoré, montraient indéniablement qu’elle n’avait pas envie de leur compagnie. Il allait pourtant bien falloir qu'ils coopèrent.

- Tu as trouvé quelque chose de ton coté ? Odilia a trouvé une lettre… on sait jamais, peut-être qu’elle contiendra un indice.

Sans savoir pourquoi, Myia s’était de nouveau retrouvée seule. Cela faisait plusieurs fois qu’elle arrivait en retard. Au moins, elle ne s’était pas trop fatiguée à la Laverie. Et avait même apprécié son petit séjour là-bas.
Elle avait retrouvé sa forme adulte, contente que ceux qu’elle avait croisé croient en l’explication de son… don. Sa véritable forme était son apparence juvénile. L’illusion était parfaite. Presque de quoi être vexée.
La jeune femme avait quitté la Laverie, s’était retrouvée sans trop savoir comment sur le pont du bateau, et y avait retrouvé sa paire de chaussures fugueuses. Quelle chance.
Un bruit de chute attira son attention, un son qui se perdit dans l’eau. C’est là qu’elle aperçu un autre navire, bien plus beau et majestueux que le taudis sur lequel elle se trouvait. Surement le petit côté morbide. Elle ne réfléchit même pas et s’avança dans la direction du navire. Sur la coque, bizarrement, aucun nom, rien. On aurait même dit que l’emplacement sur lequel aurait du se trouver une écriture avait été gratté, gratté, jusqu’à faire disparaître la moindre trace de peinture.
Le bruit donc, presque oublié pour le coup. Quelques têtes avaient émergé de la surface agitée de l’eau, puis finirent par disparaitre. Surement une hallucination.
D’autres personnes se trouvaient sur le navire mystérieux. Ils s’agitaient, la nouvelle attraction semblait avoir du succès. Une enfant attira son regard, déterminée dans sa démarche, et à l’écart des autres moutons. Elle franchit maladroitement le ponton qui la séparait de son nouveau bateau pirate et se mit en tête de suivre la gamine qui s’engouffrait déjà dans une ouverture dans le sol. Un escalier interminable, sombre et au bruit effrayant ! Génial ! On dirait une maison hantée ! L’excitation montait en elle mais fut vite calmée lorsqu’au bout de quelques marches, elle ne distinguait déjà plus le ciel certes nuageux, mais rassurant. Sa respiration bruyante se mêlait aux craquements du bois, à des cliquetis métalliques à l’origine inconnue. Tandis que les vagues remuant violement le navire faisaient trembler les murs poisseux et humides.
Après un instant qui lui parut interminable, toute fierté et amusement l’ayant quittée, elle s’immobilisa lorsqu’elle comprit qu’une planche avait cédé quelques étages plus bas et avait entrainé la chute de l’autre fille. Elle crut même entendre des insultes. Si jeune et déjà si vulgaire. Myia pouffa, un mélange de moquerie et d’anxiété.
Le destin vint la punir. Alors qu’elle reprenait se descente, une marche céda. Mais elle était prévenue du danger. Elle se rattrapa à une rampe, incarnée par un simple cordage. Suffisant.
Sauf que les traitresses profitèrent de cette occasion pour surgir de nouveau. Un de ses escarpins s’échappa de son pied et la déséquilibra. L cordage ne pu la retenir une seconde fois et elle entama sa chute. Oh, elle ne fut pas bien longue, mais les parois déjà bien abîmées ne survécurent pas. Alors que les escaliers entamaient un tournant, elle traversa un mur, y laissant les contours de sa silhouette, un peu comme ceux que l’on voit dans les dessins animés. Très drôle. L’émotion lui avait fait retrouver son apparence juvénile. La colère la poussa à rechercher ces traitresses de chaussures ! Lorsqu’elle mit enfin la main sur l’une d’elle, elle la jeta au loin.

- Je te déteste ! Je te déteste ! Je te déteste !

C’est là qu’elle se figea. Non, comment avait-elle pu commettre une si grave erreur… Elle s’était trompée de chaussure ! Elle courut après elle la rattrapa et la caressa. Se perdant en excuses, elle en oublia sa nouvelle ennemie. Myia prit alors conscience qu’elle… voyait. La salle assez étroite, et pourtant suffisamment éclairée.
En son centre, c'est-à-dire juste au dessus de l’endroit où s’était réfugiée sa chaussure pardonnée, une petite table ronde. En bois, comme le reste de la pièce. Posé dessus, un stylo.
Ouah, et des feuilles blanches, enfin elles avaient un peu la jaunissent à cause de l’humidité, mais elles étaient vierges de toute écriture.
Elle tourna la tête, vérifia l’état du reste de la pièce. Quelques étagères remplies de divers objets poussiéreux, un globe complètement différent de celui qu’elle connaissait, inutile.
Ah, ben voilà, enfin quelque chose d’utile. Une petite tout mignonette pochette en bandoulière pour ranger de petites choses. Myia la passa pas dessus son épaule. Au moins, elle pourrait la garder pendant ses transformations. Un bruit éveilla ses instincts.
Elle ne s’était même pas rendu compte qu’elle avait récupéré son apparence d’adulte. Elle s’empara du feutre et des feuilles, les rangea. Pour sortir, hors de question de reprendre sa… « porte d’entrée ». Elle opta pour la porte en bois, à l’encadrement finement décoré. Il n’y avait pas à dire, un beau navire. Une galerie étroite, encore.
Mais elle reprit espoir lorsqu’elle entendit des voix familières. D’autres voyageurs. Ca ne pouvait être que ça. Elle bondit en direction de la salle d’où venaient les bruits. Ils manquaient cruellement de discrétion. La jeune femme repensa alors à sa chute mémorable. Bref.
Elle tomba nez à nez avec…. Des inconnus.
Une Barbie malade, une adolescente aux airs maladroits, un asiatique renfrogné, un robot dans un corps d’enfant, tiens ça lui rappelait quelque chose. Aucun n’avait l’air menaçant cependant. Ah, et Melena, sa nouvelle amie. Elle aussi était en colère. La gamine semblait déjà vouloir quitter cette nouvelle compagnie, alors que Myia ne savait même pas pourquoi elle se trouvait ici. Elle s'arrêta, tentant de comprendre de quoi ils parlaient.

Les deux jeunes gens, après avoir cessé de se battre verbalement comme des chiffonniers, vinrent rejoindre Odilia et Lalia dans la pièce nouvellement ouverte. La jeune fille blonde assise contre le mur semblait ne pas en mener bien large et, en croisant son regard, la jeune italienne eut même l'impression d'y déceler un peu de dédain envers elle. Mais elle décidé de chasser cette idée : après tout, la pauvre n'était pas en très bonne forme... L'adolescente fit mine de ne pas se formaliser lorsque Yoru et Melena ignorèrent superbement sa main tendue. Haussant les épaules, elle replaça l'enveloppe dans sa poche. Tant pis, ils verraient l'écrit plus tard. Elle était toujours agenouillée face à la malade quand une tête brune passa par l'entrebâillement d'une porte qu'elle n'avait pas remarquée. Enfin, la couleur de cheveux importait peu, surtout que vu la clarté, l'inconnue pouvait tout aussi bien avoir les cheveux blancs. L'asiatique, après avoir essayé en vain d'allumer une lampe torche, courut droit vers la porte et rappela la fille qui s'éloignait dans le couloir. Melena ne tarda pas à le rejoindre sur le pas de la porte. Avant de se lever et d'y aller à son tour en compagnie de La Lia, elle questionna cette dernière. Personne n'avait entendu la blonde qui avait dit avoir une idée, même si elle était farfelue... Très sérieusement, elle demanda :

-Tu penses à quoi ? N'importe quelle idée serait bonne de toutes façons, et tu peux évidemment compter sur notre aide à tous.

Elle avait beaucoup insisté sur le "tous" car ils étaient tous dans la même galère et le premier qui déciderait de ne pas coopérer... Odilia ne préférait pas y penser. Yoru et Melena serait forcé de travailler ensemble, et ils n'avaient pas intérêt à les faire participer à leurs chamailleries enfantines... Alors que la jeune italienne aidait la malade à se lever pour rejoindre le reste du groupe, une cinquième personne apparut. Décidément, on se croyait dans un moulin ici ! Tout le monde les rejoignait ! Sur ce coup-ci, il s'agissait d'une petite brune au teint aussi blafard qu'elle-même. Elle lui fit un petit signe de la main ainsi qu'un discret sourire et lui demanda :

-Eh ! Comment tu t'appelles ? Tu veux nous aider à trouver le nom de ce rafiot ?

Elle espérait vraiment que cette fille aurait un quelconque pouvoir utile, ou même un talent caché, ou seulement un caractère pas trop pourri. Rien que cette dernière caractéristique serait déjà un miracle. Parce que jusque là, elle était vraiment malchanceuse... Entre les deux autres qui se disputaient, la malade qui semblait n'avoir rien à foutre de rien, l'autre qui les ignorait et repartait en coup de vent... Sentant le désespoir poindre, Odilia décida de penser à autre chose et se concentra sur l'inconnue et sur, malgré elle, Lalia qui commençait à sérieusement peser sur son épaule.

Sa remarque n’avait pas dû plaire car l’asiatique, la brune au teint de cadavre et leur clique l’avaient suivit sans perdre de temps. A moins qu’ils soient tellement désespérés qu’ils viennent chercher l‘espoir auprès d’une adolescente de 13 ans… tiens, visiblement la deuxième option était la bonne. Le grand échalas bridé l’inonda de questions à peine la porte franchie, dont on pouvait douter de l’utilité de la plupart. Quant à sa demande de lampe torche, Dakota ne pu s’empêcher de lâcher dans un sourire crispé :

- Je connais un mec dont le cul brille comme une luciole mais malheureusement il n’entre pas dans ma poche désolé.

La brunette ne semblait pas plus maligne en croyant qu’elle risquait moins en groupe que seule. Sans parler du fait qu’on leur avait demandé de venir dans un but précis, les tuer avant son accomplissement était donc pour le moins improbable. Le regard noir de Dakota exprimait bien sa pensée et Melena embraya donc sur une autre question qui lui paraissait plus pertinente. Du côté de la blondinette par contre l’avis était plus mitigé.

- J’ai trouvé un trou dans le sol, je pense pas que ça nous soit utile.

Elle désigna de sa main blessée les débris sur le sol et le trou dans le plafond sans qu’une expression autre que l’ennui ne se lise sur son visage.

Franchement que voulaient-ils trouver ? A part la cabine du capitaine il y avait peu de chance que ce rafiot contienne un indice valable. Restait peut-être la folle qui criait des insanités dans une pièce non loin mais l’adolescente n’était pas sûre d’avoir envie de ce frotter à ce genre d’individu. Elle avait déjà du mal à faire avec ses propres problèmes psychiques alors ceux des autres non merci !

Sans parler de la blonde qui n'avait rien d'autre à faire que de lui demander son nom... son nom ?? Que ce soit Dakota, Casimir ou Britney ça lui apporterait quoi de le savoir dans la situation actuelle ? A ce qu'elle savait ce n'était pas son nom à elle qu'on cherchait, mais celui du bateau, elle ignora donc royalement la question.

Quelqu’un choisit ce moment de profond silence pour pénétrer dans la cale avec l’air de celle qui est là juste de passage, mais qui voudrait quand même bien savoir de quoi on parle. Une sorte de tactique comportementale qui ne faisait que la rendre louche et dépiter Dakota à un point tel qu’elle ne put retenir un rictus de mépris. Seul point positif dans tout ça : elle en oubliait temporairement qu’elle avait peur, et c’était toujours ça de gagné.

Nouveau silence, lourd et embarrassé que Dak’ se décida à briser de sa voix glaciale :

- Bon, je sais pas ce que vous attendez au juste. On trouvera jamais rien d’utile dans la cale à moins qu’ils ne se soient amusés à écrire le nom de leur bateau sur leurs caisses de nourriture.

Elle s’approcha de l’une d’elle dont elle fit le tour avant d’écarter les bras dans une mise en scène théâtrale :

- Oh ! Mais il n’y a rien de marqué !

Réintégrant son masque de sale gosse insensible elle laissa retomber ses bras le long de son corps et balaya la petite troupe du regard avant d’ajouter alors qu’elle tournait les talons :

- Pas que ça à faire de trainer dans une pièce inutile, de chercher des lampes de poches inutiles… t’as qu’à faire un trou dans la coque si tu veux voir… et pas que ça à faire non plus de papoter. La cabine du capitaine a déjà été prise d’assaut donc rien ne sert d’aller là-bas, donc même si ça ne me plaît pas la seule piste valable c’est la folle à liée qui beugle pas loin. Sur ce…

Dakota se dirigea d’un pas vif vers l’escalier sans voir qui avait décidé de lui emboiter le pas. Elle était si désagréable que se retrouver seule ne l’aurait même pas surpris. En suivant les éclats de voix dans la semi obscurité il ne lui fallut pas longtemps en parcourant divers couloirs pour déboucher dans une pièce où trônait dans un fauteuil un cadavre bien loquace. C’était visiblement une femme, ou du moins ça l’avait été de son vivant, dont les loques étaient en aussi mauvais état que son corps.

La peur au ventre Dak’ hésita à faire un pas en avant mais finit par céder à la pression que lui imposait sa raison avant de s’éclaircir la gorge et d’annoncer la raison de sa présence :

- Hum… excusez moi… madame… mais j’aimerais savoir si par le plus pur des hasards vous connaitriez le nom du bateau où un endroit ou nous pourrions le trouver… ou n’importe quoi d’utile en fait.

Elle laissa un blanc de quelques secondes avant d’ajouter, blanche comme un linge :

- S’il-vous-plaît ?

Les jours passait sur le Slavedog Millionnaire et se ressemblaient tous. Mis à part quelques tentatives de meurtre et d’émasculation de la part de Jade et sa clique (surtout de sa clique) rien de bien folichon n’avait eu lieu. Liam avait l’impression d’avoir passer ses journées à nettoyer le rafiot et à materner Ella, et même si ce second point ne le dérangeait pas le moins du monde il fallait avouer que la petite péripétie de ce soir était la bienvenue. Rien de tel qu’une bande de zombis et un beau vaisseau fantôme pour vous requinquer un homme, et le taulard le montrait bien en massacrant à tour de bras les pauvres algues inconscientes ayant rampé jusqu’à lui tout en gardant un œil sur sa progéniture factice.

Une fois un calme relatif installé il apprit par la bouche du ménestrel la tâche qu’il leur proposait en échange de la vie. Trouver le nom de leur bateau ? Fallait être légèrement concon pour oublier ça non ? Enfin il fallait croire que les vers s’étaient insinués un peu trop loin dans leur cerveau…

Il s’approcha du pont d’algues avec un étrange boitement lié à la présence de la rouquine qui se cramponnait à sa jambe, morte de peur. Alors qu’il s’arrêtait pour tenter de la rassurer en lui disant que les morts ne mangerait son cerveau que si elle n’obéissait pas, Shannon déboula sur ses talons aiguilles pour se frotter à lui avec un air de mijaurée apeurée.

Liam dû se demander quelques secondes s’il n’avait pas loupé un épisode. Pas que ce contact soit désagréable, hein, bien au contraire. Sa main droite et la bosse qui s’étirait à hauteur de braguette le montrait bien d’ailleurs, mais bon… le trentenaire était du genre à ne pas recevoir de cadeau de la vie sans se poser de questions. Cette fille voulait forcément quelque chose, et dans ces circonstances probablement un protecteur. Sauf que niveau générosité, Liam pouvait carrément repasser, il lui adressa donc son plus beau sourire vicelard avant de lui souffler avec un regard plus qu’équivoque :

- Je n’ai pas l’âme d’un super héros. Donc si tu te colles pour gagner un bouclier sache qu’il me faudra bien plus que ça.

Jusqu’où cette Barbie serait prête à aller pour une protection ? Il avait hâte de le savoir mais malgré tout ils étaient en train de perdre du temps. Le boucan qui provenait des cales étaient peu rassurant, ces imbéciles devaient sûrement mettre le bateau sans dessus-dessous en effaçant au passage les possibles indices. S’il tenait à trouver un truc utile il valait mieux s’y mettre le plus rapidement possible avant qu’ils aient rasé le sans-nom.

Le taulard emprunta donc sans attendre la réponse de la bimbo le pont improvisé qui tanguait dangereusement sous leur pas. Si elle voulait passer il lui faudrait changer de chaussures ou apprendre à nager…

Une fois sur le pont Liam se retourna en lançant à l’adresse de Shannon, pas rassurée pour deux sous :

- En attendant que tu donnes une réponse qui me convient débrouilles toi toute seule, j’ai des choses à faire. Alors fais vite si tu ne veux pas te retrouver seule en tête à tête avec monsieur le ménestrel rongé aux vers… vas savoir peut-être qu’il aime les blondes !

Shannon voyait que Liam était sceptique. Elle le savait même avant de lui sauter dessus et de se frotter à son bras. Elle ne pensa pas à regarder son entrejambe pour voir la vive sensation qu’elle provoquait chez le taulard, mais elle s’en serait sentie grandement flattée quoi qu’un peu effrayée.

Malgré leur conversation autour du feu de camps (à évoquer ce souvenir on pourrait croire à une belle amitié entre elle et les autres voyageurs, ce qui n’était absolument pas le cas) et les remarques des autres, elle n’avait toujours pas compris que c’était un violeur et un pédophile. A ses yeux, Liam était juste un gros frustré sexuel qui avait relâché sa pression dès qu’il l’avait pu, et qui par conséquent était pas mal pervers en action. Il avait aussi une tête de bandit.

En tout cas, il n’inspirait pas la confiance, mais par contre, il dégageait une certaine assurance. Une grande arrogance également, pas du tout comparable à celle de Shannon, mais toute aussi irritante. Il n’avait rien de rassurant, mais d’un autre côté, il la rassurait. Savoir qu’elle pouvait se placer sous la protection d’un homme fort lui suffisait pour se sentir un peu plus en sécurité.

Lorsqu’il lui sourit, elle frémit et eut presque envie de crier. Mais elle se contrôla, il ne fallait pas faire de gaffe. Ce qu’il était flippant, quand même. On aurait dit qu’il allait se ruer sur elle pour la tuer… voire pire. Pour une fois, elle fut ravie qu’Ella soit présente. Il la ménageait trop pour faire ça…. Pas vrai ?

La jeune femme ne réagit pas aux paroles du vicelard. Elle en comprenait le sens mais tentait de nier l’évidence. Jusque là, elle avait toujours usé de ses charmes sans jamais passer à l’acte, n’ayant pas besoin de ça pour arriver à ses fins. Mais comme dans ce monde, rien ne fonctionnait pareil que dans le monde réel pour elle, elle commença à douter d’elle-même, et de jusqu’où elle serait capable d’aller.

Avant même de se décider si oui ou non, elle serait prête à aller jusqu’au bout pour assurer sa protection, elle se dégoûta de seulement y songer. La réponse devrait venir rapidement : non, définitivement…

Mais... Il se barrait ! Elle voyait son seul espoir de survie partir pour le bateau zombie… C’était un peu comme voir l’amour de sa vie partir à l’aéroport, l’impuissance la frustrait, elle avait envie d’exploser. Sauf qu’elle n’éprouvait désormais que du dégoût pour Liam.

Lentement, elle se mit à quatre pattes pour travers le pont sans risquer de tomber. Elle avait l’air ridicule et semblait le supplier dans une position assez provocatrice, ce qui n’était pas son intention sur le moment. Elle s’avança tel un bon toutou vers son maître.

Elle retenait les larmes qui menaçaient de faire couler son maquillage mal en point depuis son arrivée ici. Si elle acceptait, il faudrait être jolie pour le satisfaire. Et… dans sa tête, elle se maudit un million de fois de céder à son chantage, en se relevant et en se dirigeant doucement vers lui pour finalement lui tomber dans les bras.

D’accord, d’accord ! Je ferai tout ce que tu veux ! gémit-elle entre deux pleurs.

Il n’y avait pas à dire : elle n’avait plus aucun honneur et se dégoutait. Mais elle n’avait pas d’autres choix, n’est-ce pas ? Personne ne voulait d’elle. Elle était une pestiférée et jamais personne n’oserait l’aider. Ecarter les cuisses pour survivre dans de telles conditions, c’est une aubaine, non ? Elle n’avait pas d’autres choix, ce n’était pas sa faute. Elle était contrainte. Elle était même déjà violée ! Mais elle ne pouvait pas lutter. Ce n’était pas de sa faute. Elle se le répétait inlassablement pour s’en convaincre.

Lalia était choquée, outrée, suffoquée. Elle a proposé une idée, en ménageant ses effets, et voilà que personne ne l'écoutait !

Puis elle s'aperçut que une personne supplémentaire était entrée. A travers l'obscurité elle détailla la nouvelle arrivée, et tendit l'oreille. *Pitié mon Dieu, faites qu'elle soit comme moi... Cette odeur qu'ont les gens du peuple m'est insupportable! Et ce langage...* Lalia était à bout de nerfs. Cette idiote de brune pâle comme un cachet d'aspirine lui bloquait la vue, et la jeune femme enrageait de ne pouvoir se baser que sur l'ouïe.*Allez... Je vous demande pas une fille qui ait mon niveau... Juste une personne de la petite bourgeoisie... Même un nouveau riche m'irait, mais arrêtons là la déferlante de bouseux !*

Mais la faute-d'orthographe-o-phobe fut vite déçue. La nouvelle (elle avait identifié une voix de femme) n'avait rien d'ampoulé dans la voix, ni même un soupçon de classe que seuls les possédants ont. Verdit :une fille du peuple. Elle soupira intérieurement. *Encore une fille de bas étage... Ils sont légion ma parole!* Alors que Melena se décalait légèrement, Lalia put apercevoir une portion de la tête de la nouvelle, ce qui l'horrifia.*Non ! Impossible! je suis maudite!* Ce qui révulsait tant Lalia, c'était les cheveux de cette sorcière. Une ROUSSE ! Elle haïssait les roux. Car l'une des rares sujets où elle tombait en accord avec ses parents, c'est que les roux sont mauvais comme la peste. Lalia retroussa la lèvre de dégoût. Non seulement elle devait coopérer avec le prolétariat, mais maintenant elle devait supporter une rousse !

Alors que Lalia insultait mentalement les roux, elle finit par se rendre compte que une des prolétaires lui adressait la parole. *Odilia...Un prénom élégant. Cela ne lui va en aucun cas. On devrait interdire au peuple les noms qui ne sont pas à leur hauteur* Apparemment, elle était d'accord pour exécuter sa demande. Mais en était-elle capable ? Après tout elle était du peuple...

- Je vous remercie Odilia. Quel délicieux prénom, d'ailleurs ! Il vous va comme un gant !

L'idée de flatter la prolétaire lui paraissait bonne : il faillait se les concilier.

-Mais je m'égare. Je vous remercie de tout mon coeur de votre offre.

Peut-être qu'elle en faisait un trop, tout de même.

- D'après ce que j'ai saisi, toutes les personnes ici viennent du cabinet du Dr Parkinson. Il me semble également que chacun a un pouvoir qui lui est propre. Or il se trouve que le mien s'applique à ce que je supporte moins, les fautes d'orthographe.

Odilia la regardait étrangement. Peut-être ne saisissait-elle pas ce que Lalia tentait de lui expliquer. La française fut prise d'un doute. Peut être avait elle mal interprété les conversation tout à l'heure ? Elle se résolut tout de même à continuer.

- D'après ce que j'ai pu observer, mon pouvoir se manifeste par l'explosion du mot s'il est mal orthographié, produisant ainsi une lumière importante. Le problème réside dans le fait que cela est au-dessus de mes forces d'écrire la moindre faute. Cela m'est insupportable. L'idée serait donc que vous écriviez des fautes d'orthographe sur la parcelle du mur qui est la plus éclairée. De cette manière, nous pourrions lire cette lettre à l'aide des explosions.

Lalia remarquait que son interlocutrice la regardait plus étrangement encore. Une vague de mépris la submergea. c'était bien une femme de basse condition : elle n'avait surement rien saisi ! Elle aurait dû parler plus lentement ou faire des phrases plus courtes. Parce que, pour l'instant, elle doutait d'avoir été comprise.

Melena observait fixement Dakota. Elle la trouvait plus que désagréable, et arrogante comme pas permis pour son âge. Elle avait quoi ? 11, 12 ans ?! Le monde ne tournait vraiment pas rond à Dreamland. La necrophobe ne voyait même pas quoi lui répondre, tant ses réponses plates et glaciales se passaient de tout autre commentaire que "Tu sais à qui tu parles là ?!", ce qui de toute façon n'aurait rien avancé à l'affaire. Pourtant, quelque chose chez cette gamine l'intriguait. Peut-être cet espèce d'ennui incurrable du monde et des autres, qui rongeait aussi Melena depuis de nombreuses années dans le monde réel. Pendant le silence lourd qui suivit - brisé seulement par une question sans réponse de Odilia - l'irlandaise vit une silhouette qu'elle connaissait apparaitre au bas de l'escalier et les regarder avec insistance. Elle leva les yeux au ciel et fit pour l'instant mine de l'ignorer : c'était Myia. Si elle décidait de les suivre, la jeune femme s'averait sûrement plus être un fardeau qu'un atout. Bien entendu, il fallait s'entraider entre voyageurs, mais trainer des boulets intenables n'entrait pas dans les critères qui définissaient l'entraide chez Melena.

Finalement, Dakota lâcha une autre réplique cinglante et planta là le petit groupe sans un regard en arrière. La necrophobe eut un leger sourire en coin. Quelque part, cette fille lui ressemblait. Elle allait la suivre, c'était évident. Mais avant, elle se tourna vers Lalia qui, dans son dos, exposait son plan naïf à Odilia avec une voix pompeuse à la limite du supportable.

- C'est une mauvaise idée. D'abord, est-ce que tu as de quoi écrire sur du bois moisi ? Ensuite, j'te raconte pas la galère pour lire la lettre. L'éclat de ton explosion va durer quoi ? une demi seconde ?! Qu'est ce qu'on a le temps de lire dans ce laps de temps ?! Sans compter que si c'est toi qui lit la lettre, pour peu qu'elle soit importante et qu'il y ait des fautes, tu vas nous la faire exploser.

La necrophobe secouait légèrement la tête. Elle commençait à se demander si Dakota n'avait pas fait le bon choix de vouloir rester seule. Malgré son arrivée misérable qui lui avait valut un élan de sympathie, Lalia lui inspirait désormais une image plus péjorative. Melena jeta un oeil à Yoru. Lui, elle l'aurait gardé comme compagnon. Bien qu'elle ne l'estimait pas du tout, durant leur séjour sur le S.M., elle avait compris en percevant des bribes de conversations, qu'il était sur Dreamland depuis longtemps. Si il avait survécut, c'est qu'il ne devait pas être si empoté que ça, on ne sait jamais.

- Je ne sais pas ce que vous faites, mais je vais suivre la gamine là. Lâche-t-elle en se mettant aussitôt en marche, avec un bref regard appuyé vers l'asiatique.

En bas de l'escalier, elle croisait Myia. Elle la toisa un instant de ses yeux gris pâles froids, avant de dire simplement :

- C'est dangeureux par ici. Tu devrais peut-être te trouver un coin au calme et attendre que tout cela soit fini ?

Puis elle s'éloigna, cherchant du regard la direction qu'avait put prendre la petite brune il y a quelques instants. Elle suivit les éclats d'insanités qui résonnaient sur les murs humides en lui donnant l'impression d'être dans un sous-marin. Les crissements que la jeune fille percevait parfois provenant de sous ses chaussures, lui indiquaient qu'elle piétinait des cafards qu'elle ne voyait pas dans la pénombre. Avec une grimace de dégoût, elle atteint enfin la pièce recherchée par Dakota, et y pénétra silencieusement. Les yeux de la démente se tournèrent vers elle et une vague d'insulte la fit sursauter, alors qu'elle épiait les lieux. Un petit lit à baldaquin aux draps usés et sales, une coiffeuse rongée aux mites, un mirroir fendillé, un vieux bureau encombré de diverses papiers et objets, un petit sofa éventré, une panderie ouverte pleine de vêtements infestés par les blattes... l'état de la cabine était presque aussi éffrayante que la loque qui gisait sur un rocking chair. Une deuxième série de cris et d'insultes poussa l'irlandaise blafarde à prendre la parole.

- je ne suis pas sûr qu'on arrivera à en tirer quoique-ce soit en demandant poliment.

Elle désigna le bazar qui les entourait d'un signe bref.

- Peut-être en fouillant ses affaires.

Devant la mine peu enthousiaste de Dakota, Melena répliqua :

- L'équipage est sans doute mort, mais je suppose qu'il n'est pas foncièrement débile. Ils ont sûrement déjà fouiller la cabine du capitaine pour chercher en vain le nom de leur bateau. A mon avis, il va falloir mettre plus ou moins les mains à la pattes pour réussir à trouver ce fichu nom. Alors si tu n'as pas envie de te fatiguer, tu peux toujours tenter de retourner le pont et te joindre à ceux qui dévalisent joyeusement la capitaine.

Cette dernière réplique fut acceuillit par une troisième salve d'insultes de la part de la vielle folle dont l'expression était indéchiffrable. Melena, bien que dégoutée et éffrayée d'avoir sous les yeux une chose pareille, se serait bien jetée sur elle pour la faire taire. Mais après tout, peut-être Dakota n'avait-elle pas eut une si mauvaise idée, et cette vieille chose parlerait.

Lalia était partagée entre deux émotions : le soulagement et l'énervement. Soulagement, parce que l'une des personnes du groupe, la brune maladive, avait compris son plan, alors que elle n'était ni de haute naissance, ni riche, ce qui constituait un exploit. Et énervement parce que la même personne en question la prenait pour une idiote.
Bien sûr qu'elle savait que l'explosion allait durer peu de temps ! Bien sûr qu'elle n'allait pas lire elle-même la lettre ! Bref : Bien sûr qu'elle avait pensé à tout, puisqu'elle était la plus intelligente ici !
Elle avait prévu de faire écrire à la blonde simplette qui se tenait à côté d'elle des mots mal orthographiés à la suite en suffisamment grand nombre pour produire une réaction en chaîne, produisant de la lumière dans un laps de temps nécessaire à la lecture de la lettre, du moins en partie. Pour ce qui était de l'écriture, rien de plus simple ! Le mur de bois était si détérioré qu'il aurait été facile de graver des mots avec quoi que ce soit de dur ( clous, bout de bois, débris en tout genre qui devaient joncher la pièce) . Si Lalia ne l'avait pas expliqué, c'est simplement qu'elle doutait que le niveau mental des pauvres qui l'entouraient leur permette de tout enregistrer d'un coup.

Elle lança à Odilia, rassurante :

-Ne vous inquiétez pas, très chère. J'ai tout prévu.

Et tandis que que Melena partait avec cette horrible rousse - quoique, maintenant qu'elle y pensait, elle aurait pu avoir une teinture, parce que la couleur était une sorte de roux-rose-blond assez hideux. l'espoir n'est pas mort, si elle décidait par la suite de les rejoindre, peut-être n'aurait-elle pas à supporter une rousse - Lalia expliqua à la femme qui se tenait devant elle son idée dans les détails, mais en faisant régulièrement des pauses et en articulant.

Extrait de la lettre :

Moi, le musicien de la troupe, j'ai tout entendu... Ils étaient là, tous les trois, à crier, à hurler ! Je jouais de mon banjo pour m'apaiser... mais rien n'y fit. La dispute était trop intense, les hurlements trop profonds, la scène était trop tragique, au point culminant du dramatique.
Mlle A., le Capitaine et la maitresse, un triangle amoureux installé de façon machiavélique culminait au sommet du non retour.

Je n'ai rien vu, mais le son ne laissait aucun doute... et j'ai l'oreille pour ça. Un couteau planté, et les mots du capitaine : voilà, je suis tout à vous maintenant... Des mots qui scellèrent notre malheur, car elle disparu.

Le capitaine en est mort, vidé entièrement de sa substance vitale. Quand à nous, notre chair tombe lentement en lambeaux. Je suis le dernier, barricadé dans ma chambre, mais plus pour très longtemps. Peu à peu je me sens partir vers un autre monde, celui qui n'appartient ni aux morts, ni aux vivants...

Quant aux jumelles, une fouille du panneau où était accroché le nom du navire ne laisse deviner que sept marques de lettres.
Les cartes trouvées dans la cabine du capitaine montrent différentes routes empruntées par le sans nom. Les tracés vont et viennent pour la plupart du continent Ouest, nommé continent Chimérique, aux alentours du détroit et du delta.

Extrait du journal de bord :

Jour 76 : Elle est soudainement montée à bord, il faut que je la cache. J'ai mis beaucoup d'homme sur cette affaire car si elle la trouve, ça va bardé. Comme un malheureux présage, un grain dru s'est mis à tombé. Les gars sont superstitieux, ils disent que ça sent mauvais. C e n'est pas mon genre, mais en effet, je crains le pire. Nous sommes sortis du détroit, nous faisons route vers le premier continent, j'ai un compte à régler avec Roux de la Barbe.

Jour 77 : La mascarade n'aura pas duré longtemps. L'un des gars à cracher le morceaux. Comment lui en vouloir, on ne peut rien lui cacher... Enfin, j'ai dû le mettre sur la planche, j'ai une réputation à tenir, déjà que ma crédibilité en a pris un coup. Comme je le craignais, ça va barder... mais j'ai pris une décision, celle de n'être l'homme que d'une femme.

Jour 78 : Fatigué... trop de sang coulé... j'ai sur les mains... ... [le reste n'est qu'une longue empreinte d'une main dont l'encre n'est que sang.]

Suite à la question de Dakota, la Maîtresse hurla d'une voix éraillée et stridente :

« AAAAH ! Mais JeuNE SoooooTte ! Si JE LE SavAIS Je ne MaudIRais PaS toUT Ceux Qui onT EchoUés A Le TROuveR ! JE SERAis enFFFFFin EN Pppaix. GARCE ! GARCE !!! C'est cEtte GAAAARCEEEE ! C'eST ellE qUI l'a ForCER à Me plaNTer çA daNS le Bide ! »

Sur ces paroles incendiaires elle montra la poignée gravée d'un sublime couteaux enfoncer dans son ventre. Impossible de lui retirer cependant. Elle est promise, bien qu'à sa condition de morte-vivante, d'une éternelle douleur tant que la lame maudite sera fichée dans sa chaire. En s'excitant devant la bêtise de Dakota, elle rattrapa de justesse l'oeil qui avait sauté de son orbite, puis le remis à sa place...

La jeune femme fut rapidement distraite dans sa veine tentative de comprendre les raisons de sa présence sur ce navire. L’adolescente maladroite lui faisait de petits signes de la main. Elle s’approcha d’elle, attirée par la curiosité et pu entendre la question que la jeune blonde lui posa. L’aider à trouver le nom du bateau. Lui revint en mémoire la coque endommagée à l’endroit où aurait pu être écrit son nom. La jeune femme avait plus envie de découvrir ce qu’il se cachait derrière ce secret, surement sa curiosité enfantine.

- Je m’appelle Myia mais tu peux m’appeler Mimi. Enchantée. Je suis une amie de Melena ! On peut devenir amies si tu veux, je ne connais pas grand monde ici.

A mesure qu’elle parlait, Myia affichait une moue amusante, mélange entre la gêne et l’inquiétude. Ses yeux brillaient étrangement dans cet environnement sombre et humide.
En parlant de Melena, elle se tourna vers elle. Cette jeune fille qu’elle avait rencontrée dans les laveries de l’autre bateau la regardait avec dédain, lui parlait avec mépris. Au moins, elle ne l’ignorait pas…
S’éloigner et attendre que tout soit finit, ne semblait pas être une si mauvaise idée. Les cris étranges qui émanaient d’une pièce non loin d’ici, les craquements des parois en bois, et la fatigue commençaient à avoir raison de Myia.
Le fait que Melena le lui rappelle et qu’elle la laisse là, sur le seuil de cette pièce lui fit oublier ses craintes. Une autre avait prit le dessus : être seule.
Elle lui emboita le pas. Elle n’avait jamais compris le sens de l’expression « mieux vaut être seul que mal accompagné ». Une tentative pour ceux qui l’étaient de se rassurer. Elle, préférait se battre pour ne pas le rester.
Myia fixait avec intérêt la gamine-robot. Si jeune, on lui donnait facilement la maturité d’une adulte. La jeune femme se perdait dans ses pensées, torturée par sa fascination pour cette enfant. Elle s’amusa même à imaginer le don qu’elle pouvait posséder : un bras amovible qui émetait un rayon laser, des gadgets qu’elle fabriquait elle-même. Oui voilà, une gamine surdouée qui fabriquait des armes et contrainte malgré elle de s’épanouir dans un corps d’enfant. Et Myia pourrait être son assistante, certes un peu maladroite, mais toujours là en cas de besoin. Le rictus que la gamine lui lança refroidit la jeune femme et elle eu du mal à déglutir.
Pas très rassurant comme compagnie. Retrouvant son sourire elle tournoya rapidement et s’adressa de nouveau à la jeune blonde :

- Tu viens avec nous hein ?

Son intonation était presque suppliante maintenant, et son sourire ne fit pas illusion bien longtemps. N’attendant pas sa réponse, elle se mit à courir pour rattraper le nouveau binôme. Un nouveau flot de cris à l’origine inconnue l’interpella. Elle fut parcourue par des tremblements qui ne s’arrêtèrent qu’une fois en face d’une sorte de femme à la voix plus qu’ignoble. Pas besoin d’hurler, on l’entendait très bien.
Quand elle parla de malédiction, Myia tendit l’oreille, puis ses yeux descendirent jusque sur les méandres de son ventre. Quelle horreur ! La jeune femme s’approcha, fascinée par la beauté de la dague.

- Je peux la prendre ? Vous êtes morte on dirait. Si je tire un bon coup, même si ça fait mal, vous devriez en être libérée non ? Il faut être courageuse madame. Je suis même sure que cette lame ne vous fait plus mal.

Myia avait chuchoté, proche de la jeune femme, de sorte que seule elle l’entende, et surtout pour lui montrer que même en parlant moins fort, on pouvait l’entendre.
Pourquoi faire compliqué quand on pouvait faire simple. Elle désirait plus que tout, que la morte-vivant, arrête d’être si… vivante. Sa chanson suraiguë commençait à la faire dégoupiller. Elle ne tiendrait pas là, sans rien faire bien longtemps.
Puis d’abord c’était quoi cette malédiction si on se trompait de nom pour le bateau. Il n’en a plus, son nom est tabou et effacé des mémoires. Ne serait-il pas plus simple de lui en trouver un nouveau ? Ce bateau, certes ancien, mais pas moins très bien construit lui inspirait de nombreux noms : le Sans-gland, l’Eau-méga, le Mort-bide. Ce dernier nom laissa Myia perplexe, il allait si bien à cette femme squelettique au couteau enfoncé dans l’abdomen. Si on lui change le nom, on pourrait même lever la malédiction terrible qui en faisait une sorte de vaisseau fantôme. Et l’autre pourrait enfin fermer son clapet.
Vite, vite, vite, Myia n’en pouvait déjà plus. Le pragmatisme de Melena, la forçait à prendre sur elle, ne rien montrer. Chut. Se calmer. Voilà, comme ça.
Elle s’assit et tout signe d’expression quiita le visage de la jeune… fille. Voilà qu’elle avait repris sa forme d’enfant. Les autres devraient penser qu’il s’agit de sa forme d’origine. Qu’importe, elle serait d’accord avec eux.

Après avoir bien expliqué de façon bien claire en détachant chaque mot toutes les actions à faire comme si son interlocutrice était une trisomique atteinte au dernier degré, Lalia se sentit soulagée : apparemment cette petite sotte d'Odilia avait compris, puisque elle hocha de la tête sans un mot en guise d'assentiment. Miracle ! Surtout que, durant son discours, Lalia avait de sérieux doutes sur la capacité à saisir le sens de ses mots : sa compagne d'infortune avait le sourcils froncés et inspiraient longuement, et la jeune française avait assimilé cette attitude à la difficulté de se concentrer pour la comprendre.

Dans un élan de serviabilité -chose extrêmement rare- Lalia ramassa un clou qui traînait par terre et qu'elle avait repéré pendant qu'elle expliquait longuement à Odilia la marche à suivre. Pendant une bonne vingtaine de minutes, la jeune femme du peuple grava à toute vitesse des mots à la suite sur le mur, tandis que Lalia pressait ses paumes sur ses yeux pour ne rien voir. Après un long moment de flottement, elle entendit Odilia fraper dans ses mains en signe de satisfaction.

- Fini !

Lalia enleva alors ses mains de son visage et ouvrit les yeux. Une chose est claire, Odilia n'avait pas chômé : toute la partie éclairée du mur était couverte d'inscriptions. Elle commença sa lecture : "jeu cré dé fote d'ortograffe..." Une rage sourde commença à bouillonner en elle. Puis les lettres rougirent et explosèrent les unes après les autres. Pshhhh.... Bam, bam, bam, bam ! Une lumière orangeâtre envahit la pièce, et plus la lecture se poursuivait, plus les fautes étaient horribles, plus la lumière se faisait forte... Lalia avait du mal à supporter tant de fautes d'orthographe d'un coup, mais s'efforçait de continuer.

Au bout de ce qui lui semblait une éternité, elle avait fini la lecture infernale. Le mur fumait encore, et les yeux de la jeune française étaient si douloureux que des larmes s'en écoulaient sans qu'elle s'en aperçoive. Tant de fautes, c'était inhumain pour elle... A ce moment, elle aurait voulu mourir. L'aveuglement passé, elle s'enquit du contenu de la lettre au près de celle qui était à l'origine de sa souffrance. Odilia résuma rapidement. Une malédiction pesait donc depuis la mort du capitaine...Et cette Melle A. qui est-elle ?

Apparemment, il n'y avait plus rien à faire dans cette pièce. Lalia se dépécha donc de suivre ceux qui étaient déjà sortis, en espérant qu'ils aient trouvé quelque chose de plus concluant. En passant l'embrasure de la porte, Lalia hésita, puis e retourna. Elle prit le clou pointu que Odilia avait utilisé. *Bof. Ça peut toujours servir...*

Alexander sortit de la salle de repos. Il avait encore du mal à réaliser, tout était arrivé si vite....
Il s'était rendu chez le Docteur Parkinson en voiture... Il ne voulait pas fuir devant une éventuelle guérison. Ce docteur, un homme à l'air banal lui avait proposé comme méthode de guérison l'hypnose. Ridicule ! Une simple hypnose... comme si cela allait marcher !
Mais il s'était laissé faire.... Et il avait atterri dans un endroit étrange, qui ne ressemblait à rien de ce qu'il connaissait, en proie au froid mordant du vent... Et c'est là qu'il avait vu pour la première fois cette étrangeté...

-Et voilà que ça recommence...

Des flocons de neiges chutaient sur le sol. Il commençait à peine à saisir pourquoi cet évènement arrivait ainsi. Il supposait que cela dépendait de son humeur, ou quelque chose du même acabit. En tout cas, ce symbole d'hiver lui en avait coûté, des histoires !
Au bout de quelques jours, il avait découvert que l'endroit où il se trouvait s'appelait Elipse. Chose peu importante, lorsqu'on découvre ensuite que l'on est avec ses semblables (appelé voyageur, paraît-il...) pourchassé par les habitants, pour dieu en sait quels raisons... Il avait suivi un groupe de jeunes filles qu'ils trouvaient étranges, mais de loin... Après tout, il ne voulait pas côtoyer ce genre de personnes...

Mais il fallait croire que c'était sa destinée, car peu de temps après, il avait été capturé par ce qui semblaient être des esclavagistes.... Et ils s'étaient retrouvé dans ce navire moisi, avec tout ce beau monde étrange... Lui qui n'avait jamais été en mer, car la brise marine est toujours froide...
Tiens, il allait l'oublier celle-ci... Il devait se dépêcher, si il voulait rester entier. Il se dit qu'il devait rentrer dans la salle de repos. Mais c'est alors qu'il vit une partie de ces inquiétants personnages sur un bateau... fantôme. Comment un tel bâtiment pouvait-il encore naviguer?
Il aperçut alors un cadavre sur le navire....

- " Ne vous inquiétez pas monsieur Blizzhead, je ferais tout pour que vous puissiez avoir une vie normale... Regardez le pendule et vous serez guéri..." Mon oeil oui! Je vais devenir fou, si je ne meurs pas de froid!

Il se mit à réfléchir, après être rentré de nouveau dans le navire. Il devait faire son choix, et vite. Soit il décidait de faire confiance à ces gens, qui n'avaient pas de toute façon l'air véritablement mauvais.... Soit il décidait de se débrouiller seul, et d'essayer de partir le plus vite d'ici.... Dans un cas, il risquait de ne pas être accepté, et de mourir de froid... Mais d'un autre côté, il devait essayer d'affronter sa peur. Et puis, il était vêtu chaudement, non ?
Il entendit alors la complainte du cadavre qu'il avait aperçu. Il cherchait un nom. Le nom de quoi ? Le nom de qui ? Il ne saurait pas tant qu'il ne bougerait pas de là....
Il décida de choisir la troisième solution. Il sortit de sa cachette. Le vent avait l'air de s'être calmé. Il se blottit dans ses vêtements, et s'approcha d'un homme et d'une jeune femme qui se trouvait sur le pont de l'autre navire.

-Bonjour à vous ! Excusez-moi, mais ne sauriez-vous pas ce qui se passe ici? En effet ...

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que le vent se leva, et il courut alors vers la cale du navire fantôme... Ce navire était certes pourri et grouillait de vers, il abritait contre le froid!

-Maintenant, il faut absolument que je trouve quelqu'un...

[et ba... ça faisait longtemps que j'avais pas posté moué...]

Encore une nuit sur ce maudit rafiot, à somnoler plus que dormir, les muscles endoloris par les travaux de forçats et à grelotter à cause de l'éternelle brise glacée. Cette nuit là, c'était le contact gluant et écœurant qui tira Maxim de son demi sommeil.

"Ah !" Cria-t-il aussi soudainement qu'il abattit sa main sur le lien végétal qui tentait de le ligotait. Il tira dessus de toutes ses forces, avec ses deux mains, mais rien n'empêchait l'algue de remonter sa jambe, de plus en plus haut. Pris au dépourvu, il se mordit une récente plaie pour la réouvrir. Il activa son précieux pouvoir pour former une lame acérée de son liquide vitale. Cette solution s'avéra radicale, elle servit même à libérer ceux qui étaient encore piégés.

En dehors de la cale, c'était le bal des morts-vivants. Les algues avaient saucissonné les esclavagistes incompétents, et le Ménestrel imposait sa vision des choses. Trouver le nom de leur navire était donc leur mission ? Ils auraient la paix après ?

Le jeune homme décida de participer à la fête. De toutes manières, leur chair putride empestait déjà le Slavedog Millionnaire, alors autant se dégourdir les pattes de l'autre côté. D'ailleurs, il se délecta mesquinement devant les camarades d'infortune qui franchissaient le pont glissant fort maladroitement. Ceux qui tombaient à la flotte auraient presque put tirer un sourire à Max. Enfin, il ne se débrouilla pas mieux que les autres. Ça glissait, ça schlinguait, c'était mou... rien de rassurant. Mais au moins n'était-il pas tombé.

La cabine du capitaine faisait déjà l'œuvre d'une investigation... passons. Il s'enfonça un étage en dessous. L'escalier qui descendait craquait d'un son inquiétant. La rambarde branlait sérieusement et menaçait de lâcher au moindre surpoids. Arrivé enfin en bas, il entendit dans la pénombre une voix s'élever, quelqu'un qui cherchait de la compagnie. Le jeune homme ne put s'empêcher d'y répondre :

"Alors princesse, on se sent seule ?"

Il n'attendit pas la réponse, et poussa prudemment une porte trempée par l'eau salée. Cette dernière grinça horriblement. Cela faisait penser à une vieille souffrant d'articulations douloureuse. A bien y penser, c'était la même chose, à la différence près que la porte avait ses gonds rouillés. Il esquissa un sourire de satisfaction, il avait fait une belle métaphore... une marque d'intelligence pour une fois, et une fois n'est pas coutume. La preuve, une fois qu'il fut entré dans la pièce, son pied s'enfonça dans le plancher pourrit.

"ET M... !"

C'était coincé. Tout en tirant sur sa jambe aussi fort que possible, il jeta un vif coup d'oeil aux alentours. Personne devant lui, pas de danger apparent, juste plusieurs rangées de hamacs qui se balançaient à vide, et à leur pieds, des coffres au bois moisi...

Lorsque le Dr. Parkinson l'avait hypnotisée, Alyssia s'était "retrouvée" dans une sorte de ville, qu'elle avait déjà vue dans ces rêves étranges qu'elle faisait toutes les nuits, et qui portait, si elle se souvenait bien, un nom en rapport avec le soleil. Elle avait été poursuivie par des habitants de la ville, comme, apparement, nombre de gens qu'elle ne connaissait pas, puis s'était retrouvée dans un campement improvisé au bord de la ville, avec les autres. Là-bas, des gens les avaient enlevés et emmenés sur ce bateau. Dehors, les algues attrappaient les gens. La jeune filla avait réussi à se mettre à l'abri dans une pièce tout en bas d'un escalier, sans doute une sorte de cale.

Le sommeil la fuyait. L'humidité ambiante avait fait boucler ses longs cheveux caramel. Ses frêles épaules grelottaient. L'obscurité était totale. La faim lui tordait le ventre. Elle était fourbue de courbatures, mais pas blessée _ il n'aurait manqué plus que ça... . Elle entendit soudain des pas dans l'escalier. D'une voix affirmant une assurance placide qu'elle était loin de ressentir, dans une dérisoire tentative de se prouver qu'il n'y avait personne, elle lança :

- Il y a quelqu'un ?

Une voix masculine lui répondit. Elle ne semblait pas menaçante, mais Alyssia choisit de se dissimuler dans l'ombre. En voyant un jeune homme entre 22 et 25 ans aux cheveux noirs. Il se coinca la jambe dans du bois pourri.

Veillant à ne pas trop s'approcher, méfiante, Alyssia sortit de l'ombre et demanda :

- Vous avez besoin d'aide ?

Ce fichu pied était bel et bien coincé. S'il y avait une question existentielle que se posait Maxim, c'était comment pouvait resté coincé une chose qui était rentré facilement. Franchement, qui n'a pas lutter pour retirer une bague de son doigt, qu'on avait pourtant facilement enfilé ? Et bien là c'était pareil, il ne comprenait pas pourquoi son pied, qui s'était enfoncé comme dans du beurre dans ce bois pourri, n'arrivait pas à en ressortir. C'était fort incommodant et qui plus est, il sentait d'étranges bestioles grouiller en dessous. Il redoubla d'effort, cédant presque à la panique.

Avant de se faire piéger, il avait répondu à l'appel d'un homme qui cherchait de la compagnie. Aussi fut-il fort surpris quand une voix féminine lui proposa de l'aide. Alors c'était ça son pouvoir au mec, prendre une voix de gonzesse ? V'là la phobie quoi... Non, ça ne devait pas être cela, il devait y avoir quelqu'un d'autre, certainement. Il se contorsionna pour voir qui l'observait timidement : une silhouette dans la pénombre, un corps frêle, une anorexique sans doute. Et cette tignasse, doux Jesus...

"T'as apporté le pied biche au moins ?"

Vivre, ou plutôt survivre dans ce Mad world avait donner à Maxim un certains sens du contact. Non pas qu'il était moins gêné ou moins incommodé par sa maladie mentale, mais au moins, il allait directement à l'essentiel... avec une pointe d'ironie. Sans la fixer d'avantage, avant qu'une angoisse ne survienne, il ajouta.

"Peut-être trouveras-tu quelque chose pour désincarcéré mon pied dans une des malles là bas. Ca devait être une des chambres des matelots, à en juger par les rangs de hamacs... et fais gaffe à ne pas t'enfoncer comme moi... le plancher est vraiment pourri."

Où était l'époque pas si lointaine où il formait un pseudo groupe avec Elie et Jade, et l'autre traitresse de gamine qui préférait flirter avec le diable. Il y avait Lily aussi... enfin, elle était morte, mais avait fait un gros bout de chemin avec eux. Maintenant il était seul, mais valait-il mieux cela qu'être mal accompagné. Et au moins, solitaire comme il était, il avait moins de risque d'angoisser, et par conséquent moins de risque d'accomplir son rituel de soulagement. Dieu qu'il en avait souffert, et dieu qu'il en souffrait encore. Surtout que dans ce monde, la mutilation qu'il opérait avait des effets surnaturels. En s'écorchant son corps, il écorchait celui des autres. Il pouvait également à partir du fer dans son sang constitué des lames sortant de ses plaies. *La souffrance qui engendre la souffrance...*

C'est dingue à ce qu'on peut pensé quand on a le pied coincé...

- Alors princesse on se sent seule ?

Alexander se retourna. Qui avait pu parler ainsi ? Et est-ce qu'on s'adressait à lui ?
Cela l'énervait un peu... Et les flocons commencèrent à tomber...

Roh nan, pas encore ces merdes...

Il les repoussa. Bon, allait-il aller à la rencontre de l'inconnu qui s'était adressé à lui ?
Il réfléchissait encore à ce qu'il allait faire, lorsqu'il entendit un craquement de bois, et un juron étouffé.

* Bon allez Alexander, je ne vois pas pourquoi tu ne t'approcherais pas de lui... Il pourra peut-être t'aider ! De quoi as-tu peur ?*

Mais au fond de lui-même, il connaissait déjà la réponse. La peur d'être rejeté, pour sa main
manquante, pour sa phobie...
Mais il devait aider cet homme! S'il était blessé?
Il commença donc à se dépêcher. Il entendait d'autres paroles... Une voix féminine. Elle devait parler à l'homme. Il entendit encore l'homme, qui demandait si elle ne pouvait pas trouver quelque chose pour lui décoincer la jambe. Il entra alors, et vit l'homme qui avait dû l'interpellé, sa jambe dans un trou, et une femme.

-Bonjour à vous! Je croyais que j'allais rester seul dans ce rafiot pourri!

Il contempla le plancher. Vraiment moisi ce truc... Au bout de la pièce, des coffres se trouvaient devant des hamacs.

-Vraiment moisi ce truc !

Il s'avança prudemment vers un coffre, dans lequel il trouva.... une lame rouillée.

-Attention !

Il enfonça la lame, et élargit le trou à côté de la jambe de l'étranger. Il lui tendit la main.

-Je me nomme Alexander. Et vous?

* Quel imbécile... ce n'est vraiment pas le moment de parler ainsi! De plus, tu n'as même pas laissé la femme faire quoi que ce soit...*

Puis il se rendit compte que philosopher ne servait à rien. Très contrarié, il attendit, en voyant les flocons de neige tomber autour de lui...

Lalia était un peu perdue. Elle avait voulu suivre Melena et sa comparse dont elle avait cru au départ qu'elle était rousse, -Quel soulagement tout de même quand elle s'est rendu compte que la jeune fille était une sorte de blonde avec une coloration (immonde d'ailleurs : un rose grisâtre très laid )!- , mais elle n'entendait pas âme qui vive dans le couloir qui jouxtait la salle où elle et Odilia avaient pris connaissance de la lettre. Odilia sur ses talons, Lalia continua d'inspecter cette partie du bateau. A chacun de leurs pas, les lattes du parquet pourri grinçaient horriblement.
Alors qu'elles avaient parcouru à peine deux mètres, Lalia entendit un bruit de succion *Slurrrighup!* quand elle marcha sur une parcelle du parquet anormalement pourrie par rapport aux autres. Elle posa à nouveau son talon sur la planche, il eut un bruit encore plus immonde qui s'échappa et un LVNI (liquide visqueux non identifié) ainsi qu'une odeur de charoge s'en échappa.Quand elle appuya pour de bon sur le bois corrompu, la planche céda et se désintégra dans un nuage verdâtre et un fumet digne d'une éructation de putois.

-EeeEEEEeeeEEEeewwwwwwwwwwwww ! s'écrièrent en coeur les deux femmes.
(Apparemment, le dégoût spontané s'exprime de la même façon, quelque soit la classe sociale)

Le profond dégoût pour le liquide immonde plus ou moins passé, Lalia risqua un regard vers le trou qu'elle avait ouvert dans le parquet. Au milieu du magma infâme et puant flottait quelque chose... En tout cas c'était peu ragoûtant. Espérant un peu d'aide, elle chercha le regard de Odilia, mais celle-ci était devenue pâle comme un linge. Lalia en déduisit qu'elle devrait se débrouiller seule. Elle se mit alors à pincer du bout des doigts cette chose indéfinie et se mit à tirer. La "chose" était spongieuse au toucher, nauséabonde, et résistait aux tractions pas franchement agressives de la française. Lalia soupira bruyamment. Ce n'était visiblement pas la demi-mesure qui allaient lui permettre d'extirper la "chose"!
Lalia ferma alors les yeux avant de plonger les bras jusqu'au coude dans cette glu grumeleuse. Elle écarta les doigts dans la vase et finit par sentir la "chose". Elle l'agrippa et tira de toutes ses forces. Dans son effort, elle se mit même à crier, ce qui donnait quelque chose comme :

- IIIIIAAAAAAH !, suivi d'un "sssssSSSssSSSSSllllLLLLuuuRp... Plop!"

Quand elle réussit à sortir ses mains de l'affreuse gelée, elle tomba sur les fesses. Reprenant ses esprits, elle détailla se qu'elle en avait sorti : Une sorte de baluchon spongieux d'assez grande taille, qui dégageait sans surprise une horrible odeur. Lalia tâta le sac, mais n'avait aucune envie de l'ouvrir, elle et sa camarade de malheur pourraient bien en mourir asphyxiées.

-Alors, que faisons-nous à présent ?

La question était évidemment plus rhétorique qu'autre chose.