Malison chez Parkinson

Une heure. C'est le temps qu'il fallu à Anna pour parcourir d'elle-même les cinq cents mètres qui la séparait du cabinet du Docteur Parkinson. Après de longues discussions avec l'autre Docteur, elle avait fini par accepter de se faire hypnotiser bien qu'elle ne croyait certainement pas en cette méthode. Après tout, elle n'est pas malade ni folle. Seulement, avec le stress et l'angoisse elle semble avoir fait surgir de nouvelles crises, c'est pourquoi on l'aura vu tomber à plusieurs reprises, se relever, longer les murs les jambes flageolantes, pousser quelques cris à quelques hallucinations avant d'arriver enfin devant la porte du cabinet, haletante et un tant soit peu débraillée. Quel beau tableau.

~Ding doonng~

« Anna Malison... j'ai rendez-vous avec le Docteur...heu... Machin. »

La porte s'ouvre laissant la jeune Anna passer. Ses pas résonnent légèrement dans le couloir étroit qui la sépare de la salle d'attente. Il fait pas très chaud et en plus une drôle d'odeur semble présente... Beurk, plutôt l'envie de faire demi-tour.
La salle d'attente, quant à elle, est beaucoup plus accueillante. Deux gros fauteuils, quelques chaises par ci par là, une table avec un pile de magazines scientifiques et psychologiques et surtout une chaleur étouffante. Anna décide de s'installer dans le gros fauteuil près de la porte, enfin plutôt de s'y affaler, ses jambes ne tenant plus.

*Quelle chaleur ! On veut me faire griller ou quoi ?... J'sais même pas pourquoi j'suis venue ici. Enfin, j'pourrais pas repartir tout de suite... je vais attendre un peu le temps que... je puisse récupérer de l'équilibre. Je savais bien que j'devais pas venir... Pff.*

Après deux ou trois minutes seule à grommeler dans ses pensées, la porte du cabinet s'ouvre, invitant la demoiselle Malison à entrer. Celle-ci s'extirpe du moelleux fauteuil avec un peu plus de facilité que tout à l'heure et s'engouffre dans la pièce.

« Bonjour Docteur...Parking...heu non...ah oui, Parkinson, c'est ça. Je m'appelle Anna Malison. J'ai.. enfin.. On a pris rendez-vous pour moi ici. Mais je vois pas pourquoi. J'vais très bien. Je suis juste un peu fatiguée. Voilà, J'peux partir ? »

Le docteur Parkinson était un peu troublé, et ne savait pas forcément comment s'y prendre. Il avait reçu une lettre de demande d'un éminent confrère recommandant des séances devenant de plus en plus réputés d'hypnose. Mais cette méthode n'aidait que les personnes atteints de pathologies... impalpable, issu d'une corruption du fonctionnement du cerveau.

Dans le cas de la demoiselle, le problème était concret, c'était une maladie dégénérative, atteignant des domaines physiologiques. Comment s'y prendre, comment s'orienter...

Il ouvrit la porte de son cabinet et reçu Malison. Elle tremblait, semblait perdue et effrayée. On l'aurait dit bousculée. Il l'accueillit aimablement et la convia à s'asseoir, non sans proposer son aide.

"Mademoiselle Malison, c'est un confrère qui vous envoie. Pour être franc, je ne sais quoi espérer de l'hypnose pour votre cas... Mais si votre commanditaire le préconise, alors pourquoi pas ? Cela ne vous fera pas de mal."

Il la conduisit dans un grand dortoir où dormait déjà une dizaine de personnes.

"Allongez vous confortablement, ne luttez pas et suivez mon pendule... écoutez ma voix..."

L'obscurité et l'ambiance de velours amplissait la salle d'une quiétude confortable. Malison, déjà fatiguée, ne pourrait lutter très longtemps...

"En plongeant dans le rêve, nous trouverons peut-être pourquoi la Lewy vous a attrapé si tôt. Et cela vous fera une bonne sieste. A trois vous plongerez dans un sommeille profond... A tout à l'heure.
1, 2, 3."

"Mais j'vais très bien, j'dors juste peu ces temps-ci. Papa ne veut pas m'croire. C'est plutôt lui qui devrait être ici, pas moi."

Anna se laisse mener jusqu'au dortoir, ne pouvant pas trop lutter vu dans quel état son ses jambes. Tout d'abord, elle mis un peu de temps à s'habituer à l'obscurité. La pièce semblait noire, sans rien ni personne à l'intérieur. Puis au fur et à mesure des contours se dessinent, laissant voir les prémices de ce qui pouvait être des lits et des personnes profondément endormies.

Anna baisse d'un ton pour ne pas les réveiller.

"Pourquoi ils sont là ? Eux aussi on croit qu'ils sont fous ? Vous savez, moi je pense que les fous sont ceux qui nous prennent pour eux."

Voilà qu'il l'a fait allonger dans ce lit assez confortable et douillet. Il est étrangement chaud, comme si toutes les conditions étaient réunis pour passer une agréable nuit. Le Docteur lui présente désormais son instrument magique et lui passe devant les yeux, plusieurs fois, laissant le phénomène agir de lui-même.

Un. Une aiguille d'horloge qui se balance... Un corps qui se remue de droite à gauche... Une herbe qui se couche sur le côté... Un pendule qui fait sombrer tantôt dans le sommeil, tantôt dans l'éveil...

"Arretez dont cela... votre..heu.. truc là me fait tourner là tête"

Deux. Dans ses pupilles à moitiés cachées dansent le pendule comme un rite ancêstral. Tourne et tourne et tourbillonne le pendule. Danse, danse...danse...

"... Et.. puis.. vous êtes q..."

Trois. Les paupières de la petite sont complètement fermées. Une respiration lente et posée indique qu'elle est parfaitement endormie.

Bonne nuit, les petits...